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Photo du rédacteurJohan Schies

L'an pire contre-attaque

3ème planète du système solaire – 153ème jour

Il n’est qu’à cinq mois de nous et nous semble pourtant déjà si lointain. Rappelons-nous le 1er jour de cette historique année, point de bascule dans lequel nous avions placé l’espoir fou d’un véritable changement collectif. Dernière année d’une décennie bouleversante, nous avions pris les 12 mois à venir à bras le corps, avec l’envie féroce d’en découdre et d’améliorer les choses. Qu’en est-il aujourd’hui? Le bilan est pour moi bien triste tant j’ai le sentiment que les lumières du monde d’après se consument déjà en ravivant les flammes du monde d’avant.

Tout avait déjà mal commencé. Après deux mois pleins de rebondissements où chaque nouvelle tragédie chassait l’autre, la mort de Kobe nous faisant oublier les incendies ravageant l’Australie, chassant eux-mêmes le spectre de la troisième guerre mondiale Américano-Iranienne évitée d’un tweet et alors que les spécialistes ne voyaient se profiler à l’horizon qu’une « petite gripette » qui ne devait durer que quelques jours (Haha ha c’était du made in China), nous avions déjà eu notre lot de drames, d’armes et de larmes. Mais l’espoir ne nous avait alors pas encore complètement quitté, certes le démarrage avait été difficile mais le reste de l’année s’annonçait prometteur avec ses grands évènements sportifs, concerts, festivals etc…

Donc, l’économie mondiale à l’arrêt, plus de 6 millions de malades, quasiment 370 000 morts de part et d’autre de la planète, une crise économique et sociale plus tard, la nature nous ayant très gentiment renvoyée dans nos chambrettes de cités dortoirs pour faire le point, quand nous sortons enfin de cette « gripette » qui nous aura mis à genoux, que se passe-t-il ? Comme un enfant puni qui sort de sa chambre ou un prisonnier libéré nous revenons à la vie plus forts, plus aguerris, meilleurs qu’avant, après que l’enfermement nous ait aidé à tirer les leçons de nos erreurs.

Définitivement, radicalement, impérieusement … non

J’en veux pour première preuve la réouverture ce week-end des décharges publiques que l’ancien monde dénommait « parcs ». Après avoir vomit ses masques contaminés sur la voie publique, il n’aura fallu à la faune humaine locale, qu’une journée d’accessibilité dans ses poumons citadins pour que de nouvelles mauvaises habitudes fassent surface. Non content d’avoir pu pourrir son intérieur durant les semaines de confinement, elle déverse avec délectation ses déchets sur le moindre espace aéré sous couverts d’évacuer son stress et de se réjouir socialement, chose dont elle aurait été trop longtemps frustrée. La guerre contre mère nature reprend de plus belle, nouvelles batailles à venir oui mais en pire.

Mais que pouvions-nous attendre de cette engeance qui n’a profité de ce temps-mort, unique dans l’histoire humaine, que pour déplafonner sa consommation de tabacs, d’alcools et de graisses alimentaires. Le tabac c’est tabou mais en quarantaine on s’en fout voilà un crédo pris un peu trop au pied de la lettre, une augmentation record chez les fumeurs de 27% de la consommation de cigarettes à tel point que l’on craint désormais une pénurie mondiale de sèches. Après le PQ et la farine, mettez vos clopes au coffre, le tabac, c’est tabou mais plein les poches, on s’en fout.

Coté grignotage et visio apéro c’est très intéressant aussi, plus de 2,5 kilos pris en moyenne par les français qui pourtant n’ont jamais autant couru. A croire que la lecture, la musique, le télétravail et l’apprentissage de nouvelles compétences ne sont pas des activités qui captivent notre société. Si bien qu’avant l’été nous aurions bien besoin d’une sèche justement. Réjouissons-nous la crise économique arrive, rien de mieux que de ne pas manger à sa faim pendant plusieurs semaines pour rentrer dans un 36.

Nous pouvons sortir à nouveau, s’entasser comme avant dans les transports souterrains ou reprendre sa voiture et quel bonheur pour le frustré chauffard du dimanche que de remettre le pied à la pédale, et voilà un fabuleux retour en force des accidents mortels sur la route et des grands excès de vitesse (+15%) qui vient parachever le triomphant retour de l’homme aux commandes de la vie. La métaphore est claire, nous allons dans le mur et à très grande vitesse.

Nous sommes libres à nouveau mais nous nous servons, à tort, du confinement comme excuse pour justifier nos excès en tous genre.

Car il fallait bien sortir un jour et surtout libérer de leur studio d’enregistrement personnel tous ses chanteurs en phase d’oubli qui, de fait, n’ont pu prendre la dose annuelle de présence médiatique que leur offrait la tournée des enfoirés et se sont rabattus sur les réseaux pour nous faire écouter en avant-première un titre inédit de leur composition dont les recettes seront reversées (après déductions des charges fixes, variables, impôts, amortissement du matériel, des droits d’auteurs etc) entièrement au personnel médical. Bien évidemment, quand sortira leur prochain album, les fruits de la dite chanson iront à l’auteur, hein, faut pas déconner quand même.

« L'avenir de l'humanité reste indéterminé, parce qu'il dépend d'elle » disait Henri Bergson et plus l’on sort de cette pause et plus je vois la lumière de l’espoir s’amenuir.

Là où beaucoup ont vécu cette séquence historique comme une crise, certains voient déjà la planche à billets redémarrer. Le plus ch’ti de nos créateurs français allant jusqu’à repousser le tournage d’un film sur l’arrivée de la 5G pour préparer une histoire sur le confinement que nous venons de subir. C’est bien quand le fer est chaud qu’il faut vendre la peau de l’ours. Et certains ont même bien profité de la pandémie pour se gonfler le portefeuille puisque selon Forbes « Entre le 18 mars et le 19 mai, les 600 ultra riches américains ont ainsi vu leur fortune augmenter de 434 milliards de dollars, soit une hausse de près de 15% en deux mois ». La CGT a eu beau fermer les sites d’Amazon en France, Bezos a tout de même vu sa fortune personnelle grimper de 30%, et grâce à nos conneries sur Facebook, Zuckerberg, lui, peut même se gratifier d’un +46%. #tristessenumérique. Internet c’est comme avant mais en pire.

Et c’est Polanski qui doit allègrement se polir le César en voyant comment les faits du monde occultent ses méfaits personnels. Car oui, n’oublions pas que l’académie l’a récompensé d’une statuette sur fond de polémique, dissociant l’homme de l’artiste ou l’homme de son œuvre. J’imagine que l’augmentation des plaintes de 30% pour violences conjugales enregistrées durant la quarantaine seront aussi sujettes à interprétation, dissociant le connard de son œuvre. Petite lueur d’espoir malgré tout, rappelons-nous que Weinstein a pris 21 ans de prison au mois de février dernier comme quoi cela ne prend que 20 ans de procédure avant de voir un violeur être emprisonné. Vivement l’été et le retour de la misogynie sur nos plages pour que l’on reparle de la condition féminine. Et comme nous sommes appelés à rester dans l’hexagone nous aurons droit à un machisme franco-français … j’ai hâte. Si la mouvance #metoo lancée en 2018 a pris de l’ampleur elle est encore loin d’avoir atteint toutes les sphères de notre société et ce malgré le beau pamphlet paru en 2018 dans la revue hebdomadaire d’outre-manche The Lancet.

Et The Lancet, parlons en maintenant pour évoquer le controversé sujet de la chloroquine, miraculeux remède de grand-mère et de son premier chevalier, le Professeur Raoult. (Oh mon dieu quelle transition d’auteur)

Génie incompris ou prophète charlatanesque, personnalité clivante émergeante de l’année, quoique bientôt éclipsé par le mensonge de Kylie Jenner à Forbes, testeur détesté par ses pères, aux impairs de communication, prochainement statufié au pied de la bonne mère, suppléant les Zidanes et autres Soprano comme figure de proue de la révolte phocéenne. Elite ou peuple, Paris ou province, angéliques indépendants contre laboratoires diaboliquement pharmaceutiques, voilà posées les bases d’un clivage malaisant opposant finalement des français à des français, des humains à des humains. En oubliant que l’important est de soigner, de guérir et non de tirer à soi la couverture médiatique-financière qu’offre cette crise. Et au vu de cette année mouvementée, le vaccin s’administrera très vraisemblablement par voie rectale.


Et dans ce contexte tendu comment ne pas évoquer les violents affrontements sur le sol américain après le meurtre de Georges Floyd, nouveau décès marquant d’un afro-américain, étincelle enflammant les démons de la haine raciale. Genou au cou, un policier de ce blanc américain que nous voyons dans les films interpelle un homme que la crise a rendu chômeur. En 19 années de service notre intrépide agent de l’ordre a déjà fait l’objet de 18 plaintes, rengaine d’anniversaire comme un petit cadeau personnel que de tabasser de la viande humaine de temps en temps. Dans les séries que nous aimons, ces agissements seraient ceux d’un multirécidiviste que nous courageux héros doivent stopper mais dans la réalité il est autorisé à continuer son œuvre. L’étrange parallèle avec les propos de Camélia Jordana en France en début de semaine dernière ne sont pas à oublier, quand l’Amérique s’embrase c’est le monde occidental qui chauffe. Et après avoir évité une troisième guerre mondiale contre l’Iran en début d’année c’est vers une guerre civile que tend la fin de mandat du président Trump.

Entre élections municipales en France et présidentielles outre-Atlantique c’est désormais la crise de confiance politique qui nous guette, attention aux accords signés dans ces temps de promesses. Et combien de Hastags (#) devrons nous encore créer pour que ce monde aille mieux ? #blacklivesmatter #metoo #cesardelahonte #pasdeJOnideuro #parispoubelle


Incendies, émeutes, pillages, confinements, racisme, invasion de criquets nous n’avons fait que 153 jours dans cette année charnière et bien que les choses évoluent, nous le voyions, cela ne va en aucun cas dans le bon sens. Peu d’auteurs de science-fiction sont optimistes quant à l’avenir de l’humanité sur terre, je crois que nous leur donnons, chaque jour, un peu plus raison. L’humanité repart doucement à la conquête des étoiles, c’est peut-être là que se trouve notre salut. Pourvu que nous n’emportions pas nos démons avec nous et que l’humanovirus ne détruise pas chaque astre sur lequel il posera le pied.

« On ne doit pas élever les enfants d'après l'état présent de l'espèce humaine, mais d'après un état meilleur, possible dans l'avenir, c'est à dire d'après l'idée que l'on se fait de l'humanité... »

Emmanuel Kant - 1803

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